2019-05-15
 
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Quatre bonnes raisons de documenter la danse

Isabelle Poirier, 2015 © Svetla Atanasova, Fondation Jean-Pierre Perreault

Certains adorent ça et en font leur métier. Pour la plupart d’entre nous, la documentation et le classement d’archives restent une tâche fastidieuse que l’on reporte systématiquement aux calendes grecques. Pourtant, conserver des traces des œuvres est essentiel à la valorisation de l’art chorégraphique et à la transmission de ses savoir-faire et de ses esthétiques. Comment, en effet, construire et renforcer une identité artistique, qu’elle soit collective ou personnelle, sans balises historiques? Vidéos, photos, notations, programmes, affiches et autres documents sont les témoins d’une mémoire fragile et précieuse à préserver absolument.

Exposer nos richesses
On se plaint souvent du nombre limité de représentations des œuvres scéniques, mais on profite bien peu des possibilités de rayonnement qu’offre la perspective archivistique. De fait, la danse québécoise gagnerait en notoriété si ses artistes et leurs œuvres se retrouvaient plus souvent exposés en galerie ou au musée ou qu’ils apparaissaient dans des documentaires. L’exposition Corps rebelles, présentée au Musée de la civilisation de Québec en 2015-2016 avant d’aller séduire les Lyonnais, en France, est un bon exemple de ce que l’accès à vos documents et à vos archives peut permettre. Tout comme le long métrage sur le parcours de Vincent Warren, Un homme de danse, primé en 2016 au Festival international du Film sur l’Art.

Transmettre nos savoir-faire, actualiser nos œuvres
Louise Bédard, Pierre-Paul Savoie, Paul-André Fortier, Danièle Desnoyers, Ginette Laurin, Marie Chouinard, Daniel Léveillé et Margie Gillis. Tous ces chorégraphes ont, au cours des dernières années, remonté ou recréé une ou plusieurs de leurs œuvres emblématiques. Certains l’ont fait à partir d’archives vidéo et écrites et par une transmission de corps à corps. D’autres ont été approchés par la Fondation Jean-Pierre Perreault pour constituer des Boîtes chorégraphiquesqui «rassemblent les éléments porteurs de sens nécessaires à la reconstruction de la chorégraphie et à sa compréhension[1] Un modèle en matière de documentation à des fins de reprise d’œuvres intégrales: tels des scripts, les photos, les schémas chorégraphiques, les plans de salles et d’éclairages ou encore les costumes, fournissent des informations inestimables sur la gestuelle, l’atmosphère de l’œuvre ou sur les intentions des chorégraphes. De quoi inspirer les amateurs de reconstitution pour plusieurs générations!

Mieux se connaître
Plonger dans la documentation d’une œuvre, c’est aussi prendre le temps de poser un nouveau regard sur une démarche artistique, sur un processus créatif et sur l’objet chorégraphique qui en est né. Prendre le temps de le resituer dans un contexte sociopolitique, historique et disciplinaire. C’est se donner une chance d’approfondir la connaissance que l’on a d’une œuvre. Les documents d’archives témoignent d’un temps, d’une manière de faire. C’est à partir de telles sources documentaires que le Regroupement québécois de la danse (RQD) a pu poser les jalons d’une histoire de la danse professionnelle au Québec au 20e siècle avec la Toile-mémoire de la danse au Québec – dont la quatrième et ultime version a été éditée en 2017.

Se tailler une place dans l’histoire de l’art
La danse est souvent une grande oubliée des programmes d’enseignement de l’histoire de l’art et peu d’ouvrages documentent sa naissance et son évolution au Québec. Ainsi, à chaque fois qu’un chercheur jette son dévolu sur l’art chorégraphique, c’est tout un pan de notre histoire qu’il permet de reconstituer et de révéler sous un jour nouveau. En témoignent ces ouvrages et travaux de recherche que le RQD a compilé dans cette bibliographie sélective. Ces publications se sont appuyées sur des recherches pointues sur les archives et les traces laissées par les professionnels de la danse. Multiplions les sources de documentations et facilitons-en l’accès aux étudiants en danse et aux historiens. Si nous ne reconnaissons pas nous-mêmes la valeur de nos productions et de nos pratiques chorégraphiques, de notre patrimoine, qui le fera?

[1] EC2 – Espaces chorégraphiques 2.