Éthique des relations professionnelles: bilan de l’atelier du RDV annuel
Les membres du Regroupement québécois de la danse (RQD) ont engagé un dialogue essentiel sur le harcèlement physique et psychologique à l’œuvre dans le milieu de la danse professionnelle lors du Rendez-vous annuel des membres 2018. Une cinquantaine de personnes – artistes, travailleurs culturels, enseignants et représentants d’organismes – ont participé à cet évènement dont l’objectif était de briser la culture du silence qui règne au sein de la discipline. Bilan d’un atelier crucial qui ouvre la voie à de meilleures pratiques.
L’activité, animée par Virginie Maloney, avocate et coordonnatrice de l’Aparté et Chloé Rivard-Bourassa, intervenante psychosociale au Centre d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (CALACS) de l’Ouest-de-l’Île, s’articulait autour de questions élaborées par le RQD pour sonder l’impression générale sur la manifestation d’inconduites dans l’écosystème de la danse. Ces questions visaient à dévoiler collectivement des situations de harcèlement vécues tant dans la formation que dans la pratique professionnelle, à identifier les contextes qui favorisent des interactions malsaines tout en réfléchissant aux meilleures pratiques à adopter pour arriver à créer des espaces sécuritaires pour toutes et tous.
Des questions fondamentales
Quelles sont les situations de harcèlement en danse et quels sont les contextes qui rendent possibles de telles situations? Pourquoi est-il si difficile de s’affirmer ou de dénoncer les abus? Quelles sont les bonnes pratiques à adopter pour lutter contre les abus? À partir de ces questions posées par le RQD, d’autres ont émergé et, à la demande des membres, ont également été posées à tous: comment changer la culture de l’enseignement pour repérer plus tôt les vulnérabilités et les dynamiques de pouvoir? Comment offrir du soutien à la communauté?
Les participants étaient invités à inscrire de façon spontanée leurs réponses aux questions sur des post-its. Assemblées en mosaïque sur un grand mur de la salle, ces réponses ont été lues à haute voix par les intervenantes, ouvrant ainsi une discussion qui a permis aux membres d’en apprendre davantage sur les notions de consentement, d’agression et de harcèlement, et de s’exprimer sur ces enjeux. La quantité des réponses et la récurrence de certaines d’entre elles ont créé une onde de choc.
Mettre des mots sur les maux
Le portrait de la situation ainsi dévoilé par les membres du RQD a mis en lumière les principaux problèmes auxquels font face un nombre grandissant d’artistes et de travailleurs en danse. Les commentaires dénigrants adressés aux étudiants ou aux interprètes, les touchers inappropriés, le sexisme, les dynamiques de pouvoir, la nudité et les violences sexuelles dans la création sont des exemples de situations nommées à maintes reprises.
La précarité financière, la peur de perdre sa réputation et de nuire à sa carrière professionnelle, la banalisation des comportements abusifs et l’absence de conséquences ou de sanctions contre les personnes fautives ont été également soulevés comme étant des facteurs rendant difficiles l’affirmation de soi et la dénonciation. Au studio comme au bureau – il a été déploré qu’un nombre significatif de travailleurs et travailleuses culturels vivent des situations de harcèlement psychologique dans leur milieu de travail –, tout le monde semble touché.
Vers une ère de changement
Compte tenu de la proximité des personnes dans une communauté artistique «tissée serrée», briser le silence représente un défi de taille pour le milieu de la danse, où «tout le monde se connaît» où les agresseurs sont bien souvent «des amis». Il n’empêche que s’informer, écouter l’autre et surtout, parler ont été les maîtres mots de cette matinée où s’est renforcée la conviction que de saines relations professionnelles reposent avant tout sur la communication, le respect et le consentement mutuel.
Il s’est exprimé une forte volonté de revoir en profondeur ce qui est valorisé dans le milieu, ce qui constitue des relations justes et sécuritaires entre chorégraphes et interprètes, entre professeurs et élèves, par exemple. Un usage plus généralisé de politiques contre le harcèlement et d’un code de conduite pour les institutions et les compagnies a été recommandé par plusieurs. Les idées des membres pour un meilleur soutien à la communauté permettent ainsi de mieux orienter les actions du RQD en matière d’information, de sensibilisation et d’accompagnement des victimes d’inconduites.
Le dialogue est amorcé. Énoncer publiquement et collectivement les inconduites représente un grand pas en avant et l’horizon d’un changement de culture est en vue. À nous tous, maintenant, d’oser parler ouvertement.
Passez à l’action
► Procurez-vous l’affiche du code de conduite – produite par l’Union des artistes en collaboration avec une trentaine d’autres associations professionnelles – spécialement conçue pour outiller le secteur culturel en matière de harcèlement. Passez nous voir au bureau pour la récupérer ou téléchargez-la pour l’installer sur les murs de vos bureaux et de vos studios!
► Signez la Déclaration pour un environnement de travail exempt de harcèlement dans le milieu culturel québécois.
► Consultez la Trousse à outils Harcèlement et violence en milieu de travail du CRHSC.